jeudi 30 mai 2024

Luce

 

Je me souviens de toi à l’école primaire,

De tes dons d’inventeur, et de cet attelage

Que tu bâtis un jour avec tant de courage

Pour conquérir le monde et braver tes chimères.

 

C’est dans ce vieux cellier, dont la porte grinçante

M’effrayait de son bruit, tu trouvais ça si drôle,

Que tu as déniché ce grand morceau de tôle

Et ce tapis miteux qui nous servit de tente.

 

A l’abri de la pluie, nous écoutions l’orage

Timidement parfois nous glissions nos têtes

Sous le ciel zébré, Dieu que nous étions bêtes !

Nous rentrions bien vite évitant l’arrosage.

 

La terre détrempée, les bourrasques d’hiver

Remuaient les effluves de multiples épices,

De safran, de muscade, de thym et de réglisse

Embaumant nos journées et tout notre univers.

 

Une planche céda un matin très venteux,

Libérant une trappe et un coffre scellé.

Nous ouvrîmes la boite et, tout démantelé

Nous découvrîmes Luce, un nounours plucheux.

 

Succombant à son charme, nous nous mîmes en devoir

De redonner la vie à ce bel ursidé,

Transformant notre tente en clinique dédiée,

Pansant, cousant, lavant, travaillant jusqu’au soir

 

Dans cet élancement de joie et d’innocence

Nous avons partagé nos plus belles années.

Posé dans le berceau de mon dernier-né

Luce, notre héros, lui murmure notre enfance.


Ce petit texte est le résultat d'un exercice d'écriture qui m'imposait dix mots à utiliser.




mercredi 25 mars 2020

Ça plane pour moi !



Depuis déjà un moment je me suis tournée vers mon nombril.
Crise de la quarantaine cinquantaine, probablement.
J’ai bien lu tous les articles qui fleurissent dans les journaux de femmes « mûres » : il faut s’occuper de soi.

Plusieurs remarques cependant :
1/ après mûr, il y a pourri…. Alors non, je refuse. Je ne suis pas mûre, juste épanouie, non mais !
2/ pas facile à mon grand âge de regarder mon nombril…. je ne suis plus assez souple.
En tout état de cause, je me suis quand même rendue à l’évidence : il faut que je m’occupe de moi.
Mais vous êtes toute tendue ma p’tite dame, faut vous détendre. Vous avez essayé la sophrologie ?
Ou la la , vous être stressée vous, je vous conseille la méditation
Ah là, pour vous, je connais un truc génial : le Qi Gong
Et l’hypnose ?

Stop !
Qu’on se le dise, ces trucs-là ne sont clairement pas pour moi.
Trop lents, trop longs....
Laissez-moi tranquille !!!!

Alors tout de même, comme je suis une bonne pâte, j’ai consciencieusement essayé tout ça.
Je tiens avant tout à préciser que j’ai rencontré des professionnels sérieux et qu’à aucun moment je ne remets en cause leurs compétences.
Je n’ai par ailleurs aucun doute sur les vertus de ces différentes disciplines, et le sujet ici n’est pas d’en débattre.

Non, revenons à moi et mon nombril ! C’est bien le thème central, non ?


J'ai commencé par l'hypnose à un moment de ma vie où j’aurais de toute façon testé n'importe quoi pour éviter de me rencontrer et de dialoguer avec moi-même. Vous voyez ? Ce genre de plongée dans le cosmos à la manière Gravity.... mais sans Georges Clooney à la rescousse.
Je me suis donc prêtée à cet exercice étrange, convaincue, comme la majorité des gens, que j'étais totalement hermétique à l'hypnose.
Faux. 
Malgré une tentative de résistance (on a sa fierté tout de même !) les images se sont mises à défiler comme un rêve éveillé, le but étant de suggérer à notre sympathique subconscient (un vrai pote, celui-là) que la vie est belle. 
Raté ! C'est quand je suis sortie brutalement de ma transe en ayant clairement visionné mon corps mort, abandonné sous des feuilles, mortes elles aussi, que j'ai compris que je n’avais pas du tout envie de savoir ce que mon cher pote, ledit subconscient, avait en tête. Je déteste les films d'angoisse. 
Exit l'hypnose.

Après cette traumatisante expérience, nous sommes restés, mon subconscient et moi, un long moment sans nous adresser la parole.


Puis un jour, j'apprends que ma boîte propose un atelier Qi Gong (prononcer "Chi Kong") sur l'heure du déjeuner. Je n'avais aucune idée de ce que c'était, mais je me suis laissée convaincre par une gentille collègue enthousiaste. 
Me voici donc, affublée d'un délicieux jogging informe et de mes belles baskets roses fuchsia, très à l'aise dans l’ascenseur de mon entreprise (hall en marbre et gens très importants en costume cravate), prête à rejoindre le parc où se déroule le cours. 
Sur place, zénitude absolue.
On salue le Soleil, on fait coucou aux éléments et hop, on fait le cygne! On se relâche, on se détend (on quoi ?) et hop, on attrape la Lune !
Allez, rappelez-vous, vous les avez déjà rencontrés, ces gens qui font des mouvements étranges au ralenti, un sourire béat aux lèvres. Et avouez que vous avez même fait un détour pour ne pas passer trop près d'eux.
En ce qui nous concerne (moi, mon nombril et mon pote le subconscient), nous ne sommes pas forcément hyper en phase avec mon corps d'humaine empotée, mais je m'y suis finalement habituée (les deux autres, je ne suis pas sûre). Toutefois, me mouvoir à la vitesse d'un paresseux mimant l'envol de l'oie sauvage ou l'enracinement du chêne un soir d'orage ne m'inonde d’aucune énergie particulière. En dehors, évidemment, de l'envie subite de disparaître immédiatement sous terre. Mais la position de l'autruche ne fait pas partie du programme....
Adieu donc Qi Gong.

Me voici totalement désœuvrée, culpabilisant de ne pas être capable d’offrir un peu de détente à mon pôvre esprit torturé.


Les nuits se succèdent, peuplées de Bouddhas déchaînés. Mes cairns s'écroulent lamentablement dans un bruit de fracas infernal. 

Il me reste pourtant un dernier espoir: méditation et sophrologie. Ah, je vois déjà les puristes s'insurger à grands cris. Oui, je sais, ça n'a rien à voir. Mais les effets ayant été strictement identiques pour moi, vous me permettrez de les traiter dans le même paragraphe. Cela va écourter ma longue complainte ... et puis je fais ce que je veux de mes récits autour de mon nombril, non mais !

Or donc, disais-je.... 
J'ai testé la méditation il y a un peu plus de vingt ans lorsque j'attendais mon premier bébé. Souvenirs attendris et éblouis de plénitude absolue, j'avais envie d'essayer à nouveau.
Alors au début, ça va. Compter chacun de mes orteils, de mes doigts, de mes oreilles (une..deux), j'y arrive, très fière.
Tenter de sentir mon corps en harmonie avec la Terre, ça se gâte.
Respirer..... ayé, je m'étouffe !
Bon... on recommence. Un orteil, deux orteils...
La sophrologie, je le confirme pour rassurer les pros, j'ai bien compris que ce n'était pas la même chose. Mais cela utilise les mêmes méthodes de relaxation.... et il faut que je vous confesse quelque chose. Ça m'endort !!! Invariablement, à chaque séance, je sombre dans un sommeil profond.
Et là, c'est le drame.
Parce que, lorsqu'on est pourrie, mûre, épanouie comme moi et que l'on s'assoupit, on a une légère tendance à émettre de délicieux bruits communément appelés ronflements. Glamour, non ?

Après ce cruel aveu, il ne me reste plus qu'à me retirer sur la pointe des pieds.
Certes, il me reste le yoga...pas assez souple.
Le murmure à l'oreille des chevaux... hors de question, ces immenses bêtes me terrifient.
Le câlin aux arbres... pas très envie de finir enduite de sève ou couvertes de tiques

Hélas, je resterai à tout jamais tendue, anxieuse, stressée, angoissée, agitée, tourmentée, oppressée....

 DÉJANTÉE !!!!!

Pour vous servir !