lundi 10 septembre 2018

Faut-il descendre les poubelles ?

Je ne jette rien 
Les capuchons de stylo solitaires
Les vieux clous utilisés
Les chaussettes dépareillées…

Je ne jette pas non plus mes ricanements d’ado et mes gloussements de gamine.
Pas plus tard qu'hier je fredonnais « Napoléon est mort à Sainte Hélène, son fils Léon lui a crevé l’bidon… »
Là c'est clair j'ai perdu la moitié de mes lecteurs !

Je continue à affirmer que j'envoie des messages sur « MSN » sous le regard affligé de mes fils.
Mais promis, j'ai lâché le Minitel !

Je garde précieusement au fond d'un tiroir le premier baiser qui fait tant battre le cœur et les lettres à l'encre mauve : « Vite, vite petit facteur ! »

Mes lectrices de plus de 40 ans se souviendront sûrement de ces injonctions au postier que nous glissions sur nos courriers estivaux. Et des interminables soupirs abandonnés devant la boîte aux lettres désespérément vides !



J’ai rangé mon nounours dans une malle, avec mes premiers pleurs et le goût des petites meringues couleur pastel que je n'ai jamais retrouvées. Mais si, vous savez, celles en forme de cornet de glace ou de gaufres. 
Je lance d'ailleurs un appel ici : si vous savez où les trouver, contactez-moi ! 






Je n’oublie pas les senteurs qui me transposent instantanément ailleurs. 
Fermez les yeux et imaginez...
Une tannerie de peaux...
Un marchand d’épices... 
Un port de pêche… 
En cette période de rentrée des classes me reviennent des odeurs particulières, 
La nouvelle tenue que j'étais fière d'arborer, 
Le papier du nouveau cahier de textes (un agenda ? C'est quoi ça ?) 
L’humidité des manuels scolaires usagés dont on devait prendre soin (sous peine de les voir se transformer immédiatement en poussière) 
Et le petit nœud d’angoisse de ces instants me revient avec elles… 




J’aimerais effacer les remugles nauséabonds de ma vie mais ils ont une fâcheuse tendance à me coller à la peau. Je n'arrive pas non plus à jeter les petites phrases assassines qui jaillissent comme un coup de poignard. 
Je fouille les poubelles pour retrouver l'insouciance mais j’en sors toujours un ou deux cadavres… Cette manie de ne rien jeter ! 

Non, je ne jette rien 
Le premier regard, la première fois 
Je ne jette pas non plus la dernière fois, celle qu’on ignore encore, celle que l’on aurait aimé faire durer un peu, si on avait su… 



J'ai enfoui tout au fond de mon grenier des « j'aurais dû », des « si j'avais ».
La vieille porte du grenier s'ouvre de temps à autre en grinçant et le vent s’engouffre dans mes remords. Je balaye alors la poussière mais le vent est plus malin.
Plus malin ? Vraiment ?
Si j'avais fait....
 - Mais tu n'as pas fait et ne feras plus. Avance !
J'aurais dû...
- Ce n'était pas le bon moment. Avance !

Il y a un ogre caché sous mon lit et mes rideaux se transforment encore en monstre terrible.
Je ne dors jamais avec les pieds qui dépassent de la couette.
J’ai peur des orages et des éclairs qui illuminent la chambre tout à coup.

Je ne jette pas mon enfance, ni le drôle de lutin que j'héberge depuis ma naissance. Il me souffle des mots qui franchissent mes lèvres avant que je ne puisse les retenir et me valent parfois des « Oups ! » et des regards condescendants.
Mon sourcil gauche se lève, un sourire se forme au coin de mes lèvres et c'est parti ! Toujours prête à dire une connerie. Si vous saviez le nombre de fois où je me tais....
L'humour est mon arme même si je reconnais qu'il est parfois vaseux (poil aux yeux) et ne dépasse pas celui d'un enfant de 5 ans (poil aux dents !) 

Non, je ne nie pas le temps qui passe
Je ne jette aucun souvenir, merveilleux ou amer
J'ai éternellement dix, vingt ou quatre-vingt dix ans, selon l'humeur... 
Et je regarde tendrement mes fils, qui à leur tour, ont commencé à remplir des malles...

D'ailleurs les gars, il faudrait songer à descendre les poubelles !!!





4 commentaires:

  1. Garder la malle grande ouverte, y enfourner ce que la vie offre sans tenir d'inventaire, nourrir son âme d'enfant... Dans le rien, trouver ce petit quelque chose qui fait sourire, vibrer et en faire profiter ceux qui ont perdu la clef de la malle !

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  2. Les clés sont malines... elles se cachent parfois. Mais si on tend l'oreille on les entend ricaner. Les serrures rouillées grincent un peu, il faut parfois se pencher un peu... Et là c'est notre dos qui grince !

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  3. Elles étaient pas à l'encre mauve mes lettres 😂😂

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    1. Ah oui ? 🤔
      J'ai la mémoire qui flanche, je m'souviens plus très bien...😂

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